Voici deux avis de spécialistes, pilotes de
ligne, et diffusés sur l'ancien site Aéro "Radiococo"
en 2008.
Selon HMC:
- Capt. Fernandez: ‘Hey, we are going down!’
- Capt. Gopujkar: ‘Oh, shit!’
7 secondes après, l’A320 percute le sol 700m
avant la piste.
La probable cause de l’accident de Bangalore est
bien l’inaptitude de l’équipage à réaliser la
gravité de la situation alors que son Airbus
A320 se trouvait à très basse altitude avec une
vitesse bien trop faible pour engager une
manœuvre désespérée de remise de gaz. Ce rapport
met en cause l’ergonomie de l’avion générant des
confusions de commandes ou de contrôle.
(recommandations n°26,27,29,30,32,33,34,35,36,
et 53)
Selon la commission d’enquête d’Alain Monnier,
l’accident du Mont Ste Odile a été rendu
possible par l'absence de perception par
l'équipage de l'anomalie résultante de
trajectoire verticale, due notamment à
l'ergonomie de présentation des paramètres de
commandes ou de contrôle de cette trajectoire.*
L’accident de Bangalore était donc un vrai
précurseur de celui du Mont-Ste-Odile.
*Extrait du rapport de la commission Monnier :
32.7 -/…/ la commission considère que la
conception ergonomique des commandes d'ordre de
pilotage automatique dans le plan vertical a pu
participer à la genèse de la situation
accidentelle. Cette conception lui a semblé en
effet de nature, notamment dans les cas de
charge de travail instantanée importante, à
accroître la probabilité de certaines erreurs
d'utilisation.
* * *
Le
témoignage d'un proche du dossier du crash du
Mont Sainte Odile
Les mystères de Bangalore
30/01/07
Le 14 février 1990, l' Airbus A 320 VT-EPN d'Indian
Airlines décolle à 11heures 58, heure locale,
pour effectuer un vol de Bombay à Bangalore,
métropole indienne comptant aujourd’hui 7
millions d’habitants.
A son bord, 2 pilotes, 5 personnels navigants de
cabine et 139 passagers dont 4 enfants.
Le vol se déroule sans problème jusqu'à
l'approche sur la piste 09 de l'aéroport de
Bangalore.
Au cours de cette approche, l’avion heurte une
première fois le sol, 700 mètres avant la piste,
rebondit sur son train d'atterrissage, heurte un
talus et s’immobilise au-delà du mur de clôture
de l'aéroport.
L'avion est détruit par l'impact et par le feu.
A cause de l’accident mais aussi d’une très
mauvaise organisation des secours, 88 passagers,
les 2 pilotes et 2 des membres de l'équipage de
cabine trouvent la mort. 54 autres occupants
sont blessés à des degrés divers.
Les conditions météorologiques étaient bonnes.
Le commandant de bord avait quarante-quatre ans
et 10 340 heures de vol.
En cas d'accident aérien survenant en Inde,
trois types d'enquête peuvent être déclenchés.
Soit par la direction générale de l'aviation
civile (DGCA) qui missionne un de ses enquêteurs
accident, soit par le gouvernement qui nomme une
commission d'enquête composée d'au moins deux
membres.
Il existe un troisième niveau d'investigation
plus solennel : le gouvernement désigne une
personne qualifiée qui prend le titre de
"Court", mène l'enquête avec un ou plusieurs
experts et rédige un rapport plus volumineux.
Sur 9 accidents survenus en Inde en 1990, seul
l'accident d’A320 de Bangalore fit l'objet de la
désignation d'un "Court" qui rendit son rapport
en décembre 1990.
À cette époque, j'étais adhérent du syndicat
national des pilotes de ligne (SNPL) et membre
de sa commission technique. Environ deux fois
par trimestre, nous rencontrions l'organisme de
contrôle en vol (OCV) pour tout se dire... ou
presque.
Le 24 janvier 1991, lors de l'une de ces
rencontres, j'ai eu l'occasion d'avoir entre les
mains un exemplaire de ce rapport de plus de 600
pages avec l’autorisation de le lire mais
l’interdiction de le photocopier. Restriction
étrange s’agissant d’un document supposé
officiel.
Le document étant en anglais et le temps de
lecture compté, je suis allé à l’essentiel :
synthèse des faits établis, remarques et
recommandations du "Court".
J'ai surtout pris le maximum de notes
manuscrites. Ce sont elles que j'ai confiées aux
avocats de l'association ECHO (Victimes et
familles de victimes de l’accident du Mont Ste
Odile du 20 janvier 1992) pour transmission au
Tribunal de Colmar.
J’ai cité ces notes lors de ma comparution comme
témoin le xx mai 2006.
Après l’accident du Mont Ste Odile, j’ai été
désigné comme expert dans la commission
d’enquête ministérielle présidée par monsieur
Alain Monnier, Inspecteur Général de l’Aviation
Civile et de la Météorologie (IGACEM).
C’est dans le cadre de cette mission que le 18
juin 1992 m’a été à nouveau présenté l’accident
de Bangalore, mais sans le rapport complet du «
Court » indien.
En présence de monsieur Paul-Louis Arslanian,
chef du Bureau Enquêtes Accidents (BEA),
messieurs Philippe Benoît et Gordon Corps
représentants éminents d’Airbus nous
présentèrent en anglais les paramètres factuels
du rapport et la vision Airbusienne de
l’accident.
Ils insistèrent beaucoup sur ce que les pilotes
n’avaient pas fait comme Airbus l’enseignait si
bien, sur les problèmes matrimoniaux du pilote
indien et sur le gradient de caste entre les
deux pilotes.
Nous n’entendîmes aucune remise en cause des
conditions d’entrée en exploitation de l’avion,
ni de son ergonomie.
Toute tentative de recherche de liens entre cet
accident et celui que nous étions en train
d’investiguer était donc à proscrire. Message
subliminal pour les experts de la Commission
Monnier.
Et pourtant, il ressort pour moi de ces deux
occasions d’accès au rapport et à ses constats :
-l’ambiance générale du type « avion pilotable
par ma femme de ménage » instaurée par le
constructeur et entérinée par l’autorité de
tutelle.
-le manque d’expérience des pilotes sur ce type
d’avion de nouvelle technologie mais leur grande
expérience sur des avions de technologie
ancienne.
-la méconnaissance par les pilotes des
comportements subtils et déroutants des
automatismes de cet avion.
-la focalisation de l’attention et la
distraction des pilotes par un comportement de
l’avion qu’ils ne comprennent pas.
- la mauvaise ergonomie de l’avion ayant très
certainement causé 3 confusions de commandes des
modes de pilotage.
Par la suite, il fût dit à l’encan que ce
rapport n'avait pas d'existence officielle
puisque son contenu était contesté.
Ceci permit à Airbus de ne pas tenir compte
officiellement des enseignements à tirer de
cette catastrophe et des recommandations du
rapport du « Court » indien lors de son
Symposium du Caire du 6 mai 1990.
C’est donc sans raison officielle qu’Airbus
commença quand même à modifier son avion génial,
et initia un programme d’amélioration de ses
protections.
En refusant de tenir compte objectivement et
exhaustivement des enseignements tirés de
l’accident de Bangalore et de ses 92 morts,
Airbus et la Direction générale de l’aviation
civile française, autorité de tutelle (DGAC)
laissaient perdurer tous les facteurs causaux ou
contributifs de l’accident du Mont Ste Odile et
de ses 87 morts.
Je me suis retrouvé une troisième fois en
présence de ce mystérieux rapport. Hélas, une
porte d’armoire forte nous séparait.
C’était à Colmar dans le bureau du juge
d’instruction Guichard que j’ai rencontré
plusieurs fois en tant que partie civile.
Lorsque je lui ai parlé de l’existence de ce
rapport et de l’importance qu’il pouvait avoir
pour l’instruction, il me répondit en deux temps
: il me demanda d’abord si c’était bien un
document d’environ 600 pages puis désigna son
armoire et me dit qu’il l’avait là, mais que ce
n’était pas un document officiel.
J’ai raconté cette anecdote au tribunal ; j’ai
insisté à de nombreuses reprises auprès des
juges d’instruction et des avocats.
L’association ECHO en a fait de même.
Le mystère de Bangalore, c’est que ce rapport
n’a jamais été joint au dossier d’instruction
alors qu’il existe et qu’il est très pertinent.
Mais il est vrai qu’il pourrait permettre
d’ajouter l’expression « en connaissance de
cause » à un chef d’accusation qui changerait
ainsi de nature.
Au début du procès du Mt Ste Odile à Colmar le 2
mai 2006, le président Wagner fixa comme règle
que l’on parlerait peu du « sauvetage » et pas
du tout des autres accidents d’A320.
J’ai supposé qu’il voulait éviter ainsi que le
procès du Mont Ste Odile donne l’occasion de
refaire le procès de l’accident d’Habsheim, un
des cauchemars du système judiciaire français.
Mais cette consigne amenait aussi à ne pas
parler de Bangalore et des nombreux autres
incidents graves ou accidents précurseurs. Les
accusés ne pouvaient que s’en réjouir. Mais
pourquoi la Cour d’appel ne s’y
intéresserait-elle pas ?
On parla quand même dans les media et dans les
couloirs du dernier accident d’A320 survenu la
veille de la première audience. On en parla
pendant un à deux jours et puis…..silence, dans
les media et dans les couloirs. (
crash d'Armania à
Sotchi)
Après Bangalore, plusieurs passagers où leurs
ayants droits entamèrent des procédures devant
différents tribunaux pour obtenir des
compensations pour les préjudices subis.
En particulier devant les tribunaux indiens,
londoniens et texans.
Airbus se lança bien sûr dans de complexes
contestations juridiques. Cette bataille de
procédures se poursuivait en Cour d'appel de
Londres en 1998.
J'ignore à ce jour si ces procédures sont
terminées, si les jugements en dernier ressort
ont été prononcés, si les contentieux ont été
réglés, si les préjudices ont été compensés, si
les responsabilités pénales ont été déterminées,
si des sanctions pénales ont été prononcées.
La bataille de procédures chère à Airbus qui l’a
aussi tentée à Colmar, est un moyen peu
scrupuleux de retarder la manifestation de la
vérité et ses conséquences juridiques, pénales
et financières.
Mais ces démarches mercantiles dénuées de toute
compassion portent aussi gravement atteinte aux
victimes et à leurs familles en entravant les
nécessaires processus de deuil et de guérison
des traumatismes psychologiques. |